Madagascar bientôt envahi par des crapauds.

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C’est la cinquième plus grande île du monde après l’Australie et couvre une superficie de 590 000 km². Depuis vingt siècles, Madagascar a été façonnée par des peuples afro-asiatiques venant d’horizons divers : Afrique, Sud-Est asiatique, Proche-Orient, Europe… pour créer la société pluriculturelle malgache. Ce pays compte 22 millions d’habitants. L’originalité de Madagascar, qui a pour emblème l’arbre du voyageur, réside dans son extrême diversité : la variété du relief et du climat a favorisé la biodiversité d’une flore et d’une faune caractérisées par un important taux d’endémisme. Il y a deux ans des scientifiques ont tiré la sonnette d’alarme: une menace sérieuse pèse sur la biodiversité unique de l’île. Des crapauds d’Asie sont probablement arrivés par bateau dans des containers commerciaux au cours des années 2000 puis se sont reproduit.

 

Introduire des animaux dans un nouvel environnement est souvent nuisible aux espèces locales. L’Australie en est un exemple. Lorsque les colons arrivèrent en Australie, ils emmenèrent avec eux de nombreux animaux : chats, renards, cochons, lapins, buffles, chameaux, crapauds-buffles, etc. La plupart retournèrent à l’état sauvage et envahirent bientôt le territoire, au détriment des espèces endémiques. Ainsi, depuis la colonisation de l’Australie, 17 espèces de mammifères ont disparu. Énorme et venimeux, le crapaud-buffle est un fléau en Australie. Il a été importé d’Hawaii en 1935 pour combattre une invasion de scarabées qui attaquaient les champs de canne à sucre dans le Queensland. Le comble de l’histoire, c’est que le crapaud-buffle ne sautait pas assez haut pour pouvoir manger les scarabées. Le crapaud-buffle est nuisible dès sa naissance. Têtard, il tue les poissons qui le mangent. Adulte, il possède des glandes remplies d’un venin capable de paralyser un chien en 15 min. Les victimes de ce prédateur sont nombreuses : lézards, serpents, souris, grenouilles, petits marsupiaux, etc. Il serait même responsable de la disparition du chat marsupial dans le parc de Kakadu. Au final, ce gros batracien a progressivement envahi l’Australie, mangeant et empoisonnant sur son passage de nombreux animaux. Aujourd’hui, il sévit surtout dans la région de Darwin, au nord de l’Australie.

 

À Madagascar, ou l’invasion est plus récente, il est peut-être encore temps d’agir de façon drastique. La mauvaise nouvelle, c’est que le rapport récent d’une équipe internationale de scientifiques rend compte de la difficulté de mettre un terme à cette invasion. La menace est prise très au sérieux. Les prédateurs, qu’ils soient mammifères, oiseaux, ou grands serpents risquent de voir leur population chuter à un niveau dramatique en raison de la toxicité particulièrement importante de cette espèce de crapaud. Les populations de petits amphibiens quant à elles en sont des proies faciles. D’autres conséquences sont à redouter, car le crapaud d’Asie est un vecteur potentiel de ranavirus. Les Ranavirus sont des virus à ADN qui causent des nécroses hématopoïétiques épizootiques. Ces virus touchent les animaux aquatiques comme les poissons dont marins et les amphibiens (mort par hémorragie interne, avec symptômes d’ulcérations de la peau) ainsi que des reptiles (aux États-Unis, en Australie). Ils sont sources de maladies émergentes a priori impliquée dans le déclin général des amphibiens, tous les écosystèmes ne sont pas concernés, mais le virus s’étend, imposant des mesures prophylactiques. Les effets de cette espèce invasive sur l’écosystème et la chaine alimentaire malgache sont clairement prévisibles. Contrairement aux Australiens qui n’ont pas pour coutume de consommer les crapauds, les Malgaches des zones rurales qui dépendent des ressources naturelles tirées de la chasse et de la cueillette pour leurs besoins quotidiens n’ont même pas connaissance de ce danger et risque de le considérer comme un met de choix. De plus, le déclin des serpents pourrait mener à une pullulation de rats sur l’île. Des rats nombreux, ce n’est jamais une bonne chose, car les rongeurs peuvent dévaster les réserves de céréales et les articles de commerce. Sans parler des maladies dont ils sont porteurs.

 

Le rapport propose quatre options: ne rien faire, protéger les sites prioritaires, contenir la zone de propagation, ou l’éradication totale. La dernière option serait de loin la meilleure, mais longue est la liste des facteurs qui risquent de mener à un échec. Il y a d’ores et déjà 4 millions de crapauds d’Asie à Madagascar, d’après les estimations, et le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils sont prolifiques. Les femelles pondent en moyenne entre 20000 et 40000 oeufs chaque année. Seuls 1% de ces oeufs survit, mais cela reste un nombre conséquent. Pour maintenir la population sous le seuil de 4 millions, il serait nécessaire d’en tuer 1,5 million chaque année. Pour les exterminer, il faudrait en tuer 2,5 millions chaque année. Une telle mesure n’est pas excessivement couteuse, entre 2 et 10 millions de dollars d’après le rapport. Personne ne connaît le nombre exact de crapaud d’Asie sur l’île, ni comment ils se sont répartis. Il n’y a pas non plus de moyen simple de les trouver ou de les attraper dans le but d’une extermination. Le gouvernement devrait aussi prendre les mesures nécessaires afin d’éviter toute nouvelle invasion, protégeant ainsi l’île d’autres espèces dangereuses. À ce jour, aucune expérience similaire à cette échelle n’a été mené ailleurs. Trois projets de ce genre ont réussi, mais à petite échelle. L’éradication ne sera couronnée de succès que si ces obstacles sont surmontés. Pendant ce temps les crapauds se multiplient et risquent de devenir si nombreux que, comme dans le cas de l’Australie, tout effort de retour à un écosystème stable et sain deviendra inutile. Il y a urgence, car les crapauds s’apprêtent à coloniser une zone plus sauvage, les Pangalanes, où ils seront beaucoup plus difficiles à atteindre.

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